Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Elguijaronegro
16 juin 2006

Devos, artiste, poète, clown, rêveur, magicien des mots

« Même avec Dieu, il ne faut pas tenter le Diable ! » (La chute ascensionnelle)

-


Devos mourir sur scêne

Vidéo envoyée par jlhuss


Raymond Devos a tiré sa révérence,  jongleur de mots et comique de l'absurde, qui s'était imposé comme l'un des plus subtils manipulateurs de la langue française.

L'humoriste Raymond Devos, est mort jeudi à l'âge de 83 ans dans sa maison de Saint Rémy-les-Chevreuse, dans la banlieue de Paris.

C'est un homme d'esprit, un homme de cœur, un homme aimable qui disparaît aujourd'hui. Un homme rare. Raymond Devos est mort à son domicile de Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines), jeudi 15 juin, des suites d'une attaque cérébrale il y a plusieurs mois. Il était âgé de 83 ans. C'est un homme d'esprit, un homme de cœur, un homme aimable qui disparaît aujourd'hui. Un homme rare. Raymond Devos est mort à son domicile de Saint-Rémy-les-Chevreuse (Yvelines), jeudi 15 juin, des suites d'une attaque cérébrale il y a plusieurs mois. Il était âgé de 83 ans. Aujourd'hui, chacun est triste. (extrait, source)

Sa carrière est un immense jeu de mots. Il s'était inventé un style où images, malentendus, homonymies et figures de style se télescopaient pour débusquer l'absurde et susciter le rire.

Sa vocation était née sur la côte, un jour de tempête alors qu'il avait déjà 33 ans et voulait être comédien. "Vous ne pouvez pas voir la mer, elle est démontée", lui avait dit un serveur. "Et vous la remontez quand", avait-il répondu. Et hop, son destin était tracé, la mer démontée allait devenir un sketch, suivie du "train pour Caen (pour quand?)", de "la crise de foi (de foie?)", "je hais les haies", etc.

Il n'a ensuite pas dévié de son chemin. Roi du one-man-show, dont il était à la fois auteur, metteur en scène, acteur, musicien, il jouait les bateleurs et les acrobates en dépit de (ou grâce à) un physique très enveloppé dont il se moquait lui-même: "Vous avez remarqué qu'on dit +un bon gros+ et jamais +un bon maigre+ ?"

Il a tenu la scène pendant plusieurs décennies, puisant avec une inépuisable imagination dans les surprises du quotidien.

La fin de sa vie a été bousculée par une attaque cérébrale qui l'avait beaucoup diminué et par des querelles entre une supposée compagne et sa famille qui se sont déchirées jusqu'au tribunal. Il est mort entouré du petit cercle de ses proches, sa soeur, ses deux neveux et son secrétaire qui était aussi devenu son curateur.

Raymond Devos, bien que né à Mouscron (Belgique), en 1922, était de nationalité française. Il n'avait que deux ans quand il est arrivé en France, d'abord à Tourcoing puis dans la région parisienne et a quitté l'école assez vite pour devenir apprenti tailleur.

Il est déporté en Allemagne au titre du STO (Service du travail obligatoire), et à son retour décide de devenir comédien. A la Libération, il s'inscrit dans un cours de théâtre et galère un peu, se produisant notamment dans un cabaret de Pigalle entre deux numéros de strip-tease.

Après "la mer démontée", le succès ne va plus le quitter. Le ciseleur des mots accumule les distinctions à partir des années 1980 et siège plusieurs années au Conseil supérieur de la langue française. A 70 ans, il accepte de publier ses textes, notamment dans "Matière à rire".

L'annonce de sa mort a suscité de nombreuses réactions, du monde politique ou du milieu du spectacle, qui toutes utilisent les mêmes mots de "magicien", "jongleur", parlent d'"absurde" et de "jubilation" et le disent irremplaçable.

Le président Jacques Chirac a salué l'"irrésistible funambule des mots", le Premier ministre Dominique de Villepin "un authentique poète" et le maire de Paris, Bertrand Delanoë un "formidable clown de la syntaxe".

Irremplaçable sans doute, indémodable heureusement, inimitable évidemment, Raymond Devos qui s'interrogeait sans cesse sur le sens des mots est entré dans les programmes scolaires de langue française, du primaire au lycée. Et son nom a été donné à plusieurs établissements scolaires.

Un hommage lui a été rendu jeudi à Toulouse où s'ouvrait "le Marathon des mots".


  • « Si ma femme doit être veuve un jour, j’aimerais mieux que ce soit de mon vivant. » (Extrait du spectacle Sens dessus dessous)
  • « Je crois à l’immortalité, et pourtant je crains bien de mourir avant de la connaître. »
  • Citations choisies (sketches de R. Devos)

    Je me suis fait tout seul

    Mesdames et messieurs, je dois vous dire tout d'abord
    que je me suis fait tout seul
    et ...
    que je me suis raté.
    Je me suis raté, quoi!
    J'ai d'autant plus de mérite à l'avouer
    que ça ne se voit pas tellement!
    Encore que personne ne m'ait jamais dit:
    "Vous vous êtes réussi!"
    En réalité,
    je me suis fait plus moche que je ne suis!
    Tout au début,
    tandis que je me faisais,
    je voyais bien que je ne me faisais pas bien.
    Mais comme à chaque fois que je disais que je me faisais mal,
    les gens disaient : "C'est bien fait !",
    J'ai continué à me faire mal
    en croyant bien faire.
    Et puis,
    quand j'ai vu la tournure que je me prenais,
    j'ai tout arrêté.
    Et je me suis laissé dans l'état où vous me voyez!
    Alors, on a dit :
    "Non seulement, il est raté,
    mais en plus, il n'est pas fini !"
    Eh, bien, j'aime mieux cela!
    J'aime mieux ne pas être fini!
    Un homme fini,
    il est fini!
    On a beau me dire : "Il est réussi!"
    Je réponds : "Oui ! Mais il est fini!"
    Au fond, je préfère être inachevé,
    comme une symphonie!
    Il y a de belles symphonies inachevées.
    Encore que une personne ne m'ait jamais dit :
    "Vous êtes une belle symphonie inachevée! "
    L'avantage, quand on s'est raté,
    c'est qu'ensuite, on peut tout rater impunément,
    personne ne vous en fait grief!
    On se sent sûr de soi,
    on est serein!
    Exemple :
    A l'école, le jour des examens,
    tous mes petits camarades avaient peur
    de ne pas réussir!
    Moi, je n'avais pas peur!
    Ils se présentaient, tout tremblant, à l'examen.
    Moi, j'étais confiant !
    J'étais sûr de rater !
    Et, ça ne ratait pas !
    L'examen, je le ratais haut la main !
    (J'ai toujours réussi à rater tous mes examens.)
    Je ne sais pas comment vous expliquer.
    Pour un raté ...
    rater,
    c'est estimer avoir réussi là où les autres
    considèrent qu'ils ont raté!
    Exemple :
    chaque fois que je fais un pas en avant
    et que je le rate,
    j'ai la sensation de progresser!
    Encore que personne ne m'ait jamais dit :
    "Sur le plan raté, vous avez fait des progrès !"
    Et pourtant, j'en ai fait!
    Je rate mieux qu'avant!
    Avant,
    je ratais une fois sur deux!
    Maintenant,
    je rate à tous les coups !
    Finalement,
    il n'y a qu'une chose que je sache bien faire :
    c'est rater!
    Si bien que,
    si c'était à refaire,
    s'il fallait que je me refasse,
    je me raterais de la même façon!
    Parce que, dans le fond,
    on ne se refait pas!

    Les félicitations

    Il y a des expressions curieuses !
    Hier au soir,
    en sortant de scène,
    un monsieur me dit :
    "Je me félicite de votre succès"
    Je lui dis:
    "Mais vous n'y êtes pour rien"
    Et puis,
    à la réflexion,
    je me suis dit qu'il y était
    tout de même pour quelque chose !
    Alors, j'ai rectifié.
    Je lui ai dit :
    "Monsieur je vous félicite de mon succès"

    L'artiste

    Sur une mer imaginaire , loin de la rive...
    L'artiste en quête d'absolu,
    joue les naufragés volontaires...
    Il est là debout sur une planche qui oscille sur la mer.
    La mer est houleuse et la planche est pourrie.
    Il manque de chavirer à chaque instant.
    Il est vert de peur et il crie:
    "C'est merveilleux!
    C'est le plus beau métier du monde!"
    Et pour se rassurer il chante:
    Maman les p'tits bateaux
    Qui vont sur l'eau
    Ont-ils des jambes?
    Mais oui mon gros béta...
    et plouf, il tombe à l'eau!
    Il est rappelé à la dure réalité de la fiction.
    Lui qui se voyait déjà en haut de l'affiche,
    il se voit déjà en bas de la liste de ces chers disparus!
    Il a envie de crier:
    "Un homme à la mer!"
    Mais comme l'homme c'est lui, et que lui c'est un artiste
    et qu'il exerce le plus beau métier du monde,
    il crie:
    "Et le spectacle continue!"
    Il remonte sur sa planche pourrie.
    Il poursuit sa quête de l'absolu.
    (Chanté:)
    Maman les p'tits bateaux
    Qui vont sur l'eau
    Ont-ils des jambes?
    et plouf!
    il retombe a l'eau.
    Il est ballotté comme une bouteille à la mer,
    à l'intérieur de laquelle il y a un message de détresse.
    Il a envie de crier:
    "Une bouteille à la mer!"
    Mais comme la bouteille c'est lui,
    et que lui c'est un artiste
    et qu'il exerce le plus beau métier du monde,
    il crie:
    "L'eau est bonne!"
    Il remonte sur sa planche pourrie...
    Il a complètement perdu le nord.
    Il se croit sur la mer du même nom,
    la mer du Nord... Il fait la manche...
    Toujours la quête de l'absolu!
    (Chanté:)
    Maman les p'tits bateaux
    Qui vont sur l'eau
    Ont-ils des jambes?
    Et il retombe à l'eau.
    Le public qui est resté sagement sur la rive,
    se demande si l'artiste n'est pas en train de le mener en bateau.
    Il se dit:
    "Mais alors, quand est-ce qu'il se noie?"
    L'artiste, lui, s'aperçoit soudain
    que la planche sur laquelle il est remonté pour la énième fois
    donne de la gîte sur tribord!
    C'est-à-dire qu'elle penche du côté où il va tomber!
    Il a envie de crier:
    "Les femmes et les enfants d'abord!"
    Mais comme il est tout seul, il crie:
    "Je suis le maître à bord!"
    Il ajouterait bien:
    "Après Dieu!"
    Mais comme dans l'imaginaire, Dieu,
    on ne risque pas de le rencontrer!...
    (Dieu existe, certes... mais dans le réel!)
    Pour Dieu l'imaginaire c'est une vue de l'esprit!
    La fiction ça le dépasse!
    L'artiste sait qu'il n'a rien à attendre du Ciel.
    Alors au lieu de crier:
    "Après Dieu!"
    Il crie:
    "Après moi le déluge!"
    Et tandis que sa planche,
    qui fait eau de toutes parts,
    s'enfonce dans les eaux,
    il n'a plus qu'une pensée:
    "Sauver la recette!"
    Il fait une annonce publicitaire:
    "Mesdames et messieurs,
    la planche pourrie sur laquelle j'ai eu
    l'honneur de sombrer pour la dernière fois
    devant vous ce soir était sponsorisée
    par le Ministère de la Culture!"
    Et il coule avec la subvention!
    Il disparaît dans les flots
    et il réapparaît aussi sec...
    Il a de l'eau jusqu'à la ceinture...
    Ses deux pieds touchent le fond de la mer.
    Alors le public:
    "Ha! Ha !
    Il s'est noyé dans un verre d'eau!"
    A l'évidence, la mer imaginaire sur laquelle
    l'artiste s'était embarqué imprudemment
    est à la hauteur de son imagination.
    Elle manque de profondeur.
    C'est une mer à marée basse.
    Une mer de bas fonds!
    Une mer indigne d'un grand naufrage!...
    Alors l'artiste pour ne pas sombrer dans le ridicule...
    Il fait la planche!
    Il fait la planche pourrie.
    Il a envie de crier:
    "Une planche à la mer!"
    Mais comme la planche c'est lui,
    et que lui c'est un artiste et qu'il exerce le plus beau métier du monde,
    il crie:
    "Je suis le radeau de la Méduse à moi tout seul
    et il se pourrait que cette fois-ci,
    il n'y ait pas de survivants!..."
    Le public imperméable jusque-là, se dit:
    "C'est un spectacle cool...
    - Pas de survivants?
    - Cela promet...
    - Cela laisse entrevoir une fin heureuse!"
    Alors après avoir crié: "Bis!",
    il crie "Ter! Ter!"
    Et c'est le miracle!
    Devant le public médusé,
    l'artiste transfiguré regagne la rive
    en marchant sur les flots...
    et il se noie dans la foule!...

    J'AI DES DOUTES


    (L'artiste entre tenant d'une main, une chaise, de
    l'autre, sa guitare.)
    _ J'ai des doutes!... J'ai des doutes!...
    Hier soir, en rentrant dans mes foyers plus tôt que d'habitude...
    il y avait quelqu'un dans mes pantoufles...
    Mon meilleur copain...
    Si bien que je me demande si, quand je ne suis pas là... (s'asseyant)
    il ne se sert pas de mes affaires!...
    J'ai des doutes!...
    (Se levant)... Je vais vous jouer une étude de Sor.
    Sor était espagnol de 1778 à ... j'ai des doutes!...
    Ce n'est pas sa pointure!... vous comprenez?... alors, il la force!...
    après, moi je... (il montre que sa pantoufle est trop large).
    Il n'a qu'à s'en payer une paire!
    (Revenant à son étude:)
    Sor était espagnol de 1778... jusqu'à... sa mort... après de très belles études...
    il en a écrit plusieurs très belles aussi...
    dont la cinquième que je vais vous interpréter.
    (Il se rassied.)
    J'ai horreur que l'on se serve de mes affaires!... Pour cinq francs!...
    Il a une paire de pantoufles... n'importe où...
    La Cinquième Etude de Sor.
    (Il joue la première phrase de l'étude de Sor.)
    ... Mon pyjama!... C'est pareil!... depuis qu'il a acheté le même...
    je ne retrouve plus le mien!... il s'en sert... quoi!... il n'y a pas de doute!...
    (Il joue la deuxième phrase de l'étude de Sor.)
    ... Ma femme ne voulait pas le croire. Je lui ai dit:
    _ Tu vas voir!... un de ces jours... il va aussi se servir de tes affaires!
    Mon vieux, le lendemain, je retrouve son soutien-gorge dans la poche
    de son pardessus! Il s'en sert, quoi!... il n'y a pas de doute!
    (Il joue la troisième phrase de l'étude de Sor.)
    ... Un soir, j'arrive sur le palier... j'entends:
    "Profitons-en pendant qu'il n'est pas là!...
    Débarrasse-toi de ton bonhomme de mari, c'est un rabat-joie!..."
    Ah! mon vieux... j'entre... je dis à mon copain qui était là:
    _ Oh!... Eh!... eh!... (il lui fait signe de baisser le ton).
    Baisse un peu la radio, on l'entend d'en bas!
    Il s'en sert, quoi!... il n'y a pas de doute!
    (Il joue la quatrième phrase de l'étude de Sor.)
    ... Trois jours après!... j'entre... je le trouve dans mon lit,
    en train de fumer une cigarette, une des miennes!...
    Je dis à ma femme qui était à côté:
    _ Tu ne peux pas l'empécher de fumer, non? Il va
    brûler mes draps!...
    Il s'en sert, quoi!... il n'y a pas de doute!
    ... Alors!... mes pantoufles!... mon pyjama!... ma radio!... mes cigarettes!...
    et pourquoi pas ma femme pendant qu'il y est!...
    (Il réalise soudain que ce n'est pas seulement de ses
    affaires dont son copain abuse...)
    (Il réalise aussi qu'il a dévoilé son infortune devant tout le monde,
    et ce n'est plus qu'un pauvre homme qui joue la cinquième et dernière
    phrase de l'étude de Sor... et qui sort.)

    Je suis un imbécile
     
    Dernièrement,
    j'ai rencontré un monsieur
    qui se vantait d'être un imbécile.
    Il disait:
    - Je suis un imbécile!
    Je lui ai dit:
    - Monsieur ... c'est vite dit!
    Tout le monde peux dire:
    "Je suis un imbécile!"
    Il faut le prouver!
    Il m'a dit:
    - Je peux!
    Il m'a apporté les preuves
    de son imbécillité
    avec tellement
    d'intelligence et de
    subtilité
    que je me demande
    s'il ne m'a pas pris
    pour un imbécile!

    LE CLOU


    Un jour j'étais en train d'enfoncer un clou dans le mur.
    Il y a un type qui passe, il me dit:
    _ Pourquoi vous enfoncez ce clou?
    Je lui dis:
    _ Moi, je n'ai pas d'explications à vous donner!
    J'enfonce un clou, j'enfonce un clou!
    Le type me dit:
    _ Moi, j'aime bien savoir pourquoi...
    _ Je n'ai pas à vous dire pourquoi... J'enfonce un clou, j'enfonce un clou, c'est tout! bon!
    Et je continue d'enfoncer mon clou.
    Je l'avais presque enfoncé,
    et il ne me restait plus que ça, un centimètre quoi.
    Le type sort une tenaille
    et il arrache le clou!!
    Je lui dis:
    _ Pourquoi arrachez-vous mon clou?
    _ Je n'ai pas d'explications à vous donner, moi!
    _ Je voudrais bien savoir pourquoi?
    _ Je n'ai pas à vous dire pourquoi...
    Il est fou, ce type!
    C'est une histoire insensée, non?
    Je suis en train d'enfoncer un clou,
    un type arrive avec une tenaille
    et il arrache e clou!
    Bon... Je ne veux plus penser à ça,
    parce que ça devient une idée fixe!
    Enfin...
    (Il désigne la scie qu'il tient à la main.)
    Ca, c'est une scie que j'ai achetée
    à un monsieur qui sciait sa femme
    en deux dans les foires...
    Il enfermait sa moitié dans une caisse,
    il sciait sa caisse en deux et la moitié de sa femme tombait dans la sciure!
    Et un jour...
    sa moitié est partie avec la caisse!
    Alors, il m'a vendu la scie...
    parce que c'était le clou de son numro.
    (Il revient à sa marotte.)
    J'ai quand même le droit d'enfoncer un clou
    sans être obligé de dire pourquoi
    j'enfonce un clou?
    s'il voulait arracher un clou,
    il n'avait qu'à commencer par en planter un,
    et, après, il l'aurait arraché, ce clou!
    Il n'avait pas à arracher mon clou à moi!
    qu'est-ce qui va arriver?...
    C'est que je n'oserai plus planter
    un clou, moi!
    Hé! Si c'est pour être là à surveiller
    s'il y a quelqu'un avec une tenaille
    pour me l'arracher. Ah non! Non!
    Ca revient, hein?
    Ne parlons plus de ça!
    (Il va pour jouer de la scie... mais revient à son clou.)
    Ce n'est pas la question du clou, hein!
    Des clous, j'en ai!
    Mais, celui-là, j'y tenais!
    c'est un clou que j'avais ramassé
    tout rouillé, tout tordu.
    je l'avais redressé de mes propres mains.
    Après, je pouvais lui taper sur la tête
    comme un forcené, il ne déviait pas d'un pouce!
    Alors, quand il fallait planter un clou,
    je plantais celui-là.
    J'ai toujours enfoncé le même clou...
    pas à la même place, mais le même.
    Peut-être qu'à force d'enfoncer le même clou,
    on finit par s'y accrocher? C'est possible...
    Et un type arrive avec une tenaille
    et il arrache mon clou!
    Sans me donner d'explications!
    Si encore il m'avait dit
    pourquoi il l'avait arraché, ce clou...
    moi, je lui aurais bien dit pourquoi
    je l'avais planté, finalement!
    Si seulement... je m'en souvenais!
    Hé! ça fait longtemps de ça...
    Ca remante tout de même
    à vingt-cinq ans, cette histoire!
    Allez! Je ne veux plus penser à ça...
    Je deviendrais marteau!
    Bon!
    Je vais vous scier un tube!
    Enfin...
    Je vais vous jouer une scie!
    (Tout en jouant un morceau sur sa scie, il marmonne:)
    _ Je n'en ai plus enfoncé depuis, hein!
    C'a été fini!
    C'a été le dernier clou...
    C'a m'a coupé l'envie d'enfoncer un clou...
    Vous verrez, vous, si vous enfoncez
    un clou et qu'il y ait un type
    qui arrive... avec une tenaille...

    Lettre anonyme

    Monsieur ou madame, ou qui que vous soyez,

    J'ai longtemps hésité avant de vous écrire cette
    lettre. Né de père inconnu et de mère incertaine ...
    Trouvé dans un terrain vague, je, non-soussigné, fus
    élevé par un bienfaiteur anonyme. Je grandis
    clandestinement dans un lieu imprécis.
    Apres avoir fait mes études par correspondance
    dans une solitude complète ... je regagnais sans papiers
    et sans bagages, par une route qui n'est plus sur la
    carte, un endroit que je ne peux révéler ...
    La, j'écrivis plusieurs lettres anonymes à des correspondants
    lointains ...
    Sur le point d'être découvert ... je m'enfuis dans le
    désert d'où je vous écris ...
    Peut-être souhaiteriez-vous savoir pourquoi je me
    confie ainsi à vous dont j'ignore l'identité ? C'est dans
    un moment de dépression ... tout simplement !
    N'y voyez pas d'autres raisons ! Ne cherchez pas à
    savoir qui je suis ... mon nom ne vous dirait rien.
    Et je signe d'une main incertaine :

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . LE SUSNOMMÉ !

    P.S.: Je mets immédiatement cette lettre non datée
    dans une bouteille dont vous remarquerez que j'ai
    soigneusement gratté l'étiquette. J'irai ensuite la
    jeter à la mer qui doit se trouver approximativement
    et à vol d'oiseau quelque part au-delà de cette vaste
    étendue de sables mouvants ! Mais comme je m'y
    rends à pieds en évitant les pistes, je
    ne sais ni quand ni ou cette missive vous atteindra.

    Les Antipodes
     
    On pourrait en pousser des cris d'alarme, à propos de pas mal de choses!
    Parce qu'il s'en passe, des choses, dans le monde! . . .
    Vous avez vu que les Russes avaient découvert l'antimatière . . .
    Vous savez ce que c'est que l'antimatière? . . .
    C'est le contraire de la matière.
    Oh! ce n'est pas nouveau, je sais! . . .
    De tout temps, chaque chose a eu son "anti".
    Exemple:
    Un muet, c'est un antiparlementaire.
    Un athée, c'est un antimoine.
    Un croyant, c'est un antiseptique.
    Les Arabes du Caire sont antisémites,
    et les sémites sont anti-Caire.

    A tort ou à raison

    On ne sait jamais qui a raison ou qui a tort.
    C'est difficile de juger. Moi, j'ai longtemps donné
    raison à tout le monde.
    Jusqu'au jour où je me suis aperçu
    que la plupart des gens à qui je donnais
    raison avaient tort !
    Donc, j'avais raison !
    Par conséquent, j'avais tort !
    Tort de donner raison à des gens qui avaient
    le tort de croire qu'ils avaient raison.
    C'est-à-dire que moi qui n'avais pas tort,
    je n'avais aucune raison de ne pas donner tort
    à des gens qui prétendaient avoir raison,
    alors qu'ils avaient tort !
    J'ai raison, non ? Puisqu'ils avaient tort !
    Et sans raison, encore ! Là, j'insiste, parce que ...
    moi aussi, il arrive que j'aie tort.
    Mais quand j'ai tort, j'ai mes raisons, que je ne donne pas.
    Ce serait reconnaître mes torts !!!
    J'ai raison, non ? Remarquez ... il m'arrive aussi
    de donner raison à des gens qui ont raison.
    Mais, là encore, c'est un tort.
    C'est comme si je donnais tort à des gens qui ont tort.
    Il n'y a pas de raison !
    En résumé, je crois qu'on a toujours tort d'essayer
    d'avoir raison devant des gens qui ont toutes
    les bonnes raisons de croire qu'ils n'ont pas tort !

    Un ange passe

    On dit parfois que j'extravague...
    que je délire...
    Pourtant, il n'y a pas plus raisonnable que moi !
    Il n'y a pas d'esprit plus cartésien que le mien !
    Je ne fais que rapporter les faits tels que je les observe.
    Il est evident qu'il y a observer et observer !
    Cela dépend du sens que l'on donne au mot "observer".
    Exemple:
    Quand on demande aux gens d'observer le silence...
    au lieu de l'observer, comme on observe une eclipse de lune,
    ils l'écoutent...
    et tête baissée, encore !
    Ils ne risquent pas de le voir le silence.
    Ils le redoutent !
    Alors, dès que le silence se fait, les gens le meublent.
    Quelqu'un dit :
    - Tiens ? Un ange passe !
    alors que l'ange, il ne l'a pas vu passer !
    S'il avait le courage, comme moi, d'observer le silence en face,
    l'ange il le verrait !
    Parce que, mesdames et messieurs, lorsqu'un ange passe, je le vois !
    Je suis le seul, mais je le vois !
    Evidemment que je ne dis pas que je vois passer un ange,
    parce qu'aussitôt, dans la salle, il y a un
    doute qui plane !
    Je le vois planer, le doute !...
    Evidemment que je ne dis pas que je vois planer
    un doute parce qu'aussitôt, les questions:
    - Comment ça plane un doute ?
    - Comme ça ! (geste de la main qui oscille)
    - Comment pouvez-vous identifiez un doute avec certitude ?
    A son ombre !
    L'ombre d'un doute, c'est bien connu...!
    Si le doute fait de l'ombre, c'est que le doute existe...!
    Il n'y a pas l'ombre d'un doute !
    Et l'on sait le nombre de doutes au nombre d'ombres !
    S'il y a cent ombres, il y a cent doutes.
    Je ne sais pas comment vous convaincre ?!
    Je vous donnerais bien ma parole, mais vous allez la mettre en doute !
    Le doute... je vais le voir planer...
    Je vais dire:
    - Je vois planer un doute.
    Aussitôt, le silence va se faire...
    Quelqu'un va dire :
    - Tiens, un ange passe !
    Et il faudra tout recommencer !
    A propos de l'ange, aussi, on m'en pose des questions insidieuses:
    - Dites-moi, votre ange là, de quel sexe est-il ?
    Alors là ... (geste de la main qui oscille)
    je suis obligé de laisser planer un doute,
    parce que je n'en sais rien !
    - D'où vient-il ?
    Il va vers sa chute !
    Parce que l'ange, attiré par la lumière des projecteurs s'y précipite...
    Ebloui, l'ange s'y brule les ailes et l'ange choit !
    Et un ange qui a chu est déchu !
    Mesdames et Messieurs... à la mémoire
    de tous les anges qui sont tombés dans cette salle,
    nous allons observer une minute de silence...
    (L'artiste voyant "passer" un ange, les gens rient)
    (L'artiste avec un geste de la main qui oscille)
    Il n'y a que les doutes qui planent.

    Jésus revient

    Je viens de lire sur un mur
    une chose étonnante.
    Quelqu'un avait écrit:
    "Jésus revient."
    C'était en toutes lettres:
    "Jésus revient."
    Vous vous rendez compte?
    Jésus!
    C'est important!
    Jésus!
    C'est le ciel!
    Et les gens passaient à côté... indifférents:
    - Tiens! Jésus revient?
    Il y en a même qui faisaient des réflexions désobligeantes:
    - Eh bien, il a mis du temps!
    Et, pourtant,
    si c'était vrai?
    Si Jésus revenait?
    Ce serait merveilleux!
    "Jésus revient."
    Il est là!
    Où?
    Là!
    "Ah! c'est vous? Mon Dieu!"
    Je ne vous avais pas reconnu!
    Si j'ai entendu parler de vous?...
    Pensez!...
    Quand j'étais petit, on me parlait toujours du petit Jésus.
    Le petit Jésus!
    Je vous voyais tout petit!
    Et tout à coup,
    je découvre... un grand Seigneur!
    - Devinez qui vient dîner ce soir?
    Vous me voyez devant la porte de ma demeure,
    annonçant la nouvelle à travers le judas?
    - Devinez qui vient dîner ce soir?
    - Je vous le donne en mille: Jésus!
    - Mais non!
    - Mais si!
    Vous voyez d'ici la scène?...
    Il voudrait peut-être mieux ne pas raviver la Passion!

    Ça n'arrive qu'à moi !

    Les gens disent tous la même chose !
    Ils disent tous, lorsqu'ils leur arrivent quelque chose:
    "Ça n'arrive qu'à moi !"
    De temps en temps, il y en a un à qui il n'arrive
    rien et qui ne dit pas comme tout le monde.
    Il dit: "Ça n'arrive qu'aux autres !"
    Parce qu'il a entendu les autres dire:
    "Ça n'arrive qu'à moi !",
    il croit que ça n'arrive qu'à eux (aux autres) !
    Alors que peut-être, il n'y a qu'à lui
    que ça arrive de penser que ça n'arrive
    qu'aux autres !
    Encore que lorsqu'il s'en aperçoit,
    il dit comme les autres: "Ça n'arrive qu'à moi !"
    Cela m'est arrivé à moi !
    Alors si cela vous arrive ...
    je veux dire, si vous faites partie de ceux qui
    comme moi, disent: "Ça n'arrive qu'aux autres !"
    posez leur la question, aux autres !
    "Qu'est-ce qui vous arrive ?"
    Ils vous répondront tous la même chose :
    "Nous ne savons pas ce qui nous arrive,
    mais ça n'arrive qu'à nous !"
    Par contre, si vous faites partie des autres,
    de ceux qui disent: "Ça n'arrive qu'à moi !"
    posez-vous la question ... à vous :
    "Qu'est-ce qui t'arrive ?"
    Et vous verrez que ce qui vous arrive ...
    c'est ce qui arrive aux autres !
    C'est ce qui arrive à tout la monde !
    Et vous conclurez comme moi,
    par cette petite phrase sibylline:
    "Ce qui n'arrive qu'aux autres n'arrive qu'à moi aussi !"
    Et vous vous sentirez solidaire!

    Matière à rire
     
    Vous savez que j'ai un esprit scientifique.
    Or récement, j'ai fait une découverte bouleversante!
    En observant la matière de plus près ...
    j'ai vu des atomes ...
    qui jouaient entre eux ...
    et qui se tordaient de rire!
    Ils s'esclaffaient!
    Vous vous rendez compte ...
    des consésequences incalculables que cela peut avoir?
    Je n'ose pas trop en parler,parce que j'entend d'ici les savants!
    - Monsieur, le rire est le propre de l'homme!
    Eh oui! ...
    Et pourtant!
    Moi, j'ai vu, de mes yeux vu ...
    des atomes qui : <<Ha, ha, ha!>!>
    Maintenant, de quoi riaient-ils?
    Peut-être de moi?
    Mais je n'en suis pas sûr!
    Il serait intéressant de le savoir.
    Parce que si l'on savait ce qui amuse les atomes,
    on leur fournirait matière à rire . . .
    Si bien qu'on ne les ferait plus éclater que de rire.
    Et que deviendrait la fission nucléaire?
    Une explosion de joie!

    Parler pour ne rien dire

    Mesdames et messieurs ... Je vous signale tout de suite
    que je vais parler pour ne rien dire.
    Oh ! je sais !
    Vous pensez :
    "S'il n'a rien à dire... il ferait mieux de se taire!
    Evidemment ! Mais c'est trop facile! ... c'est trop facile!
    Vous voudriez que je fasse comme tout ceux qui n'ont rien à
    dire et qui le gardent pour eux?
    Eh bien non! Mesdames et messieurs, moi, lorsque je n'ai rien
    à dire, je veux qu'on le sache!
    Je veux en faire profiter les autres!
    Et si, vous-mêmes, mesdames et messieurs, vous n'avez rien à dire,
    eh bien, on en parle, on en discute!
    Je ne suis pas ennemi du colloque.
    Mais, me direz-vous, si on en parle pour ne rien dire,
    de quoi allons-nous parler?
    Eh bien, de rien! De rien!
    Car rien... ce n'est pas rien.
    La preuve c'est qu'on peut le soustraire.
    Exemple:
    Rien moins rien = moins que rien!
    Si l'on peut trouver moins que rien,
    c'est que rien vaut déjà quelque chose!
    On peut acheter quelque chose avec rien!
    En le multipliant
    Une fois rien ... c'est rien!
    Deux fois rien ... c'est pas beaucoup!
    Mais trois fois rien !... Pour trois fois rien on peut déjà acheter
    quelque chose!... Et pour pas cher!
    Maintenant si vous multipliez trois fois rien par trois fois rien:
    Rien multiplié par rien = rien.
    Trois multiplié par trois = neuf.
    Cela fait rien de neuf!
    Oui... ce n'est pas la peine d'en parler!
    Bon ! Parlons d'autres choses! Parlons de la situation, tenez!
    Sans préciser laquelle!
    Si vous le permettez, je vais faire
    brièvement l'historique de la situation,
    quelle qu'elle soit!
    Il y a quelques mois, souvenez-vous
    la situation pour n'être pas pire que celle
    d'aujourd'hui n'en n'était pas meilleure non plus !
    Déjà nous allions vers la catastrophe, nous le savions...
    Nous en étions conscients!
    Car il ne faudrait pas croire que les responsables d'hier étaient plus
    ignorants de la situation que ne le sont ceux d'aujourd'hui!
    Oui la catastrophe, nous le pensions, était pour demain!
    C'est-à-dire qu'en fait elle devait être pour aujourd'hui!
    Si mes calculs sont justes!
    Or, que voyons-nous aujourd'hui?
    Qu'elle est toujours pour demain!
    Alors je vous pose la question, mesdames et messieurs:
    Est-ce que c'est en remettant toujours au lendemain
    la catastrophe que nous pourrions
    faire le jour même que nos l'éviterons?
    D'ailleurs je vous signale entre
    parenthèses que si le gouvernement actuel
    n'est pas capable d'assurer la catastrophe,
    il est possible que l'opposition s'en empare !

    PRETER L'OREILLE

    "Mesdames et messieurs,
    si vous voulez bien me prêter une oreille attentive..."
    Quelle phrase!
    Voulez-vous me prêter l'oreille?
    Il paraît que quand on prête l'oreille,
    on entend mieux.
    C'est faux!
    Il m'est arrivé de prêter l'oreille à un sourd,
    il n'entendait pas mieux!
    Il y a des phrases comme ça...
    Par exemple, j'ai ouï dire qu'il y a des choses
    qui entrent par une oreille
    et qui sortent par l'autre.
    Je n'ai jamais rien vu entrer par une oreille
    et encore moins en sortir!
    Il n'y a qu'en littérature qu'on voit ça.
    Dans Rabelais, nous lisons que
    Gargamelle a mis Gargantua au monde
    par l'oreille gauche.
    Ce qui sous-entend que par l'oreille droite...
    il devait se passer des choses!
    Des cris et des chuchotements!
    De quoi vous faire dresser l'oreille!
    Alors, on me dit:
    - Mais monsieur, quand on parler de choses qui entrent
    par une oreille et qui ressortent par l'autre,
    on ne parle pas de choses vues
    mais de choses entendues.
    J'entends bien!
    Un son peut entrer par une oreille
    mais il n'en sort pas!
    Par exemple, un air peut très bien entrer
    dans le pavillon de l'oreille.
    Une fois entré, il n'en sort plus!
    Je prends un air au hasard,
    un air qui me traverse... la tête:
    Viens dans mon joli pavillon!
    Eh bien, dès qu'il est entré dans le pavillon,
    il n'en sort plus, c'est fini!
    C'est ce qu'on appellle une rengaine.
    Une rengaine, c'est un air qui commence
    par vous entrer par une oreille
    et qui finit par vous sortir par...
    les yeux!

    Ouï-dire

    Il y a des verbes qui se conjuguent
    très irrégulièrement.
    Par exemple, le verbe ouïr.
    Le verbe ouïr, au présent, ça fait:
    J'ois... j'ois...
    Si au lieu de dire "j'entends", je dis "j'ois",
    les gens vont penser que ce que j'entends est joyeux
    alors que ce que j'entends peut être
    particulièrement triste.
    Il faudrait préciser:
    "Dieu, que ce que j'ois est triste!"
    J'ois...
    Tu ois...
    Tu ois mon chien qui aboie le soir au fonds des bois?
    Il oit...
    Oyons-nous?
    Vous oyez...
    Ils oient.
    C'est bête!
    L'oie oit. Elle oit, l'oie!
    Ce que nous oyons, l'oie l'oit-elle?
    Si au lieu de dire "l'oreille",
    on dit "l'ouïe", alors:
    Pour peut que l'oie apartienne à Louis:
    - L'ouïe de l'oie de Louis a ouï.
    - Ah oui?
    Et qu'a ouï l'ouïe de l'oie de Louis?
    - Elle a ouï ce que toute oie oit...
    - Et qu'oit toute oie?
    - Toute oie oit, quand mon chien aboie
    le soir au fond des bois,
    toute oie oit:
    ouah! ouah!
    Qu'elle oit, l'oie!...
    Au passé, ça fait:
    J'ouïs...
    J'ouïs!
    Il n'y a vraiment pas de quoi!

    Le savoir-choir

    Son pianiste ayant chu de son tabouret,
    l'artiste (au public):
    Vous avez vu comme il a chu?
    (Au pianiste:)
    Quand on ne sait pas choir... on ne choit pas!
    (Au public:)
    Les gens ne savent plus choir!
    Ils savent s'asseoir...
    mais ils ne savent plus choir!
    Ils s'imaginent que choir, c'est déchoir...
    Choir n'est pas déchoir!
    Un homme qui a chu n'est pas déchu...
    à condition qu'il choie bien!
    Comme disait mon père:
    _ Où que tu chois, chois bien!
    Parce que mon père savait ce que c'était
    que choir...
    Il avait été Auguste de "ch" oirée (rectifiant)
    de soirée dans un "ch" irq... (cirque)
    sous un chapiteau!
    Il faisait ce que l'on appelle des entrées de chute.
    Cela consistait à entrer, à se laisser choir
    et à crier , d'une voix de perroquet:
    _ Bonsoir, messieurs-dames... Bonsoir, messieurs-
    dames!
    On l'appelait le père Choir, mon père!
    Il avait pas mal chu dans la "ch" sciure...
    _ c'est un mot dangereux! _
    et (évidemment) il aurait voulu
    que je choie mieux que lui!
    Tout petit, il m'incitait à choir...
    Il me disait:
    _ Allez. Chois, mon chou-chou, dans la sciu-sciure!
    Il laissait choir son mouchoir de soie.
    Il disait:
    _ Chois comme ce mouchoir de soie... mon chou!
    Chois léger!
    Qu'est-ce qu'il a pu me faire choir!!
    Non seulement, il me faisait choir chez moi,
    mais il m'envoyait choir chez les autres,
    mais l'on choit mieux chez soi...
    Tandis que chez les autres, avant de choir,
    il faut mettre des gants:
    _ Vous permettez que je choie ici?... Boum!
    Ou bien préférez-vous que je choie là?... Boum!
    Quand on a toujours chu dans la "chi"...
    dans les copeaux... enfin... des tous petits copeaux...
    comme des... chiures de mouches...
    (Rectifiant:)
    Quand on a toujours chu dans la sciure et que,
    soudainement, il faut choir sur le tapis,
    on ne chois pas dans son élément!
    On choit plus haut... que son rang!
    Et quand vous avez mal chu,
    on vous le fait savoir:
    _ Vous avez vu comme il a chu, ma chère?
    ou:
    _ Il manque de savoir-choir!
    Combien de fois ai-je entendu:
    _ Il manque de savoir-choir!
    Parce que dans un certain milieu,
    choir, cela s'apprend!
    Il y a des cours du choir!
    Je les ai "ch"uivis!
    Ils vous apprennent à choir... en trois "ch"oirs!
    Il y a d'abord le pré-choir.
    C'est l'instant qui précède le moment où l'on choit.
    Deux, vous avez le choir proprement dit.
    Alors là, on choit où l'on peut.
    On n'a pas le choix!
    Et trois, une fois chu, vous avez l'après-choir!
    Moi, j'ai eu des après-choir difficiles!
    Je ne pouvais même plus m'asseoir!
    Comme au bout de trois "ch"oirs,
    je n'étais toujours pas fichu de bien choir,
    j'ai laissé... tomber!
    Et un "ch"... jour, mon père, le père Choir, me dit:
    _ Chois un peu devant moi que je vois
    où tu en es sur le plan choir!
    Moi, je n'étais pas chaud... mais je chois!
    Il me dit:
    _ Ce n'est pas que tu chois mal, mais tu chois raide!
    Chois souple... chois comme un chat!
    Regarde un chat choir... chois comme lui
    et tu choiras bien!
    Parce qu'un chat sait choir...
    Un chien aussi sait choir,
    mais moins bien qu'un chat!
    Un soir, j'ai vu un chat choir sur un chien,
    un chiot, un chow-chow...
    un petit chiot de chow-chow!
    A la suite de tout un concours de circonstances...
    C'est-à-dire que le chat avait vu choir un
    perroquet de son perchoir...
    (Il faut remonter plus haut,
    sans cela on ne comprend pas.)
    Le perroquet avait vu choir un mouchoir d'un séchoir...
    C'était le mouchoir de soie du père Choir
    qui séchait...
    Le perroquet, voyant le mouchoir choir,
    avait chu d'où il était perché...
    Le chat, voyant le perroquet choir,
    s'était lan"ch"é...
    _ Je n'ai pas un cheveu, là? _
    (L'artiste mime le cheveu qu'il enlève de sa bouche.)
    C'est là que le chat a chu sur le chiot!
    Sous le poids du chat, le chiot a chu...
    Eh bien, le chow-chow a moins bien chu que le chat-chat!
    Chi! chi!
    Attendez, le plus chouette, c'est la chute!
    Savez-vous où le perroquet pour"ch"uivi
    par le chat est venu s'échouer?
    Dans les pieds du père Choir qui faisait son entrée,
    qu'il est venu s'échouer le perroquet!
    Le père Choir, au lieu de faire une entrée de chute,
    a fait une chute d'entrée...
    et il s'est mal re"ch"u!
    Au lieu de choir sur son "ch"éant...
    il a chu sur sa mâchoire!
    Il ne pouvait plus dire quoi que "ch"e"ch"oit!
    Finalement, c'est le perroquet qui,
    perché sur le père Choir,
    a crié:
    _ Bon"ch"oir, messieurs-dames!
    Bon"ch"oir, messieurs-dames!

    Le possédé du percepteur

    Je ne sais pas si vous croyez à la sorcellerie.
    Moi, je ne voulais pas y croire
    jusqu'au jour où je me suis aperçu
    que j'étais possédé du percepteur.
    Oui! Possédé!
    Envoûté par mon percepteur!
    Depuis quelque temps, déjà,
    je le voyais qui rôdait
    autour de ma maison.
    Il allait et venait...
    Il semblait dessiner tout en marchant des figures
    géométriques.
    En fait, il prenait des mesures fiscales!
    Et puis il disparaissait,
    et puis il revenait.
    J'avais observé aussi
    que chaque fois qu'il revenait,
    je payais un nouvel impôt sur le revenu!
    C'est d'ailleurs en faisant mes comptes
    que je me suis rendu compte
    qu'il revenait souvent!
    Et un soir, en rentrant chez moi,
    je découvre une feuille d'impôt
    clouée sur ma porte.
    C'était un premier avertissement!
    Je dois dire que je ne l'ai pas pris au sérieux.
    Je me suis simplement un peu étonné.
    J'ai dit:
    - Tiens? Au lieu de glisser la feuille
    sous la porte, ils la clouent?
    Méthode moderne! Bon!
    Quelque temps plus tard,
    en faisant le tour du propriétaire,
    je découvre,
    à chaque angle de ma propriété,
    tracées sur le sol,
    des lettres cabalistiques.
    Il y avait un T,
    un V
    et un A.
    A vol d'oiseau, ça fait T.V.A.
    Qui avait pu poser ces marques de terreur,
    sinon mon percepteur?
    Ce n'était pas sorcier à comprendre!
    Non content de me faire payer l'impôt direct,
    il essayait encore de me le faire payer indirectement!
    Par le truchement de la T.V.A.!
    J'étais cerné par la T.V.A.!
    Vous connaissez le sens secret et fiscal
    de ces trois lettres?
    T.V.A.
    Si vous prenez les deux premières lettres T.V., cela veut
    dire en clair:
    - As-tu payé la taxe sur la T.V.?
    Les lettres V.A. veulent dire:
    - Va! Va payer la taxe sur la T.V.!
    Puis T.A.: TA.
    Traduire:
    _ T'as payé la taxe sur la T.V.?... Ah...
    Alors VA la payer!
    C'est un rappel à l'ordre constant.
    Même si vous lisez les lettres à l'envers,
    elles vous rappellent encore quelque chose.
    A.V. - Avez-vous payé...?
    A.T. - Hâtez-vous de payer!...
    V.T. - Vêtez-vous et hâtez-vous de payer la taxe sur la
    T.V.!
    Là, j'ai manqué de sens civique!
    J'aurais dû me vêtir et me hâter d'aller
    payer la taxe sur la valeur ajoutée.
    Au lieu de quoi,
    je me suis rendu au siège
    de la Sécurité sociale
    pour me faire rembourser une somme
    importante qui m'était due
    depuis fort longtemps.
    Naturellement, on m'a répondu
    que mon dossier s'était égaré...
    Je dois dire que j'en fus presque soulagé.
    Enfin, une chose qui se déroulait
    normalement, comme prévu!
    J'en avais presque oublié mon percepteur...
    Lorsque, dans la nuit qui suivit,
    je suis réveillé par un
    ululement de percepteur.
    Je ne sais pas si vous avez déjà
    entendu ululer un percepteur
    dans la nuit?
    C'est sinistre! Inhumain!
    Je me précipite à la fenêtre
    et je vois sous la lune argentée
    - car, dès que la lune est argentée,
    mon percepteur rapplique -,
    je vois mon percepteur
    qui se livrait, à un étrange cérémonial.
    Il ouvrait les bras,
    les fermait,
    les rouvrait.
    Je me dis: Il doit chercher à voler.
    Et, tout à coup,
    je distingue dans le reflet de la vitre
    quelque chose qui bougeait derrière moi.
    Je me retourne et je vois
    ma rente Pinay
    que j'avais posée sur mon bureau
    se plier,
    se replier,
    et, par un sortilège, se transformer en
    une cocotte en papier.
    Laquelle cocotte a pris son envol
    et, à l'appel du percepteur,
    est allée se poser sur son épaule.
    Mon percepteur s'en est saisi... l'a dépliée,
    l'a repliée
    et en a fait un petit avion
    qu'il a lancé comme ça, en l'air,
    comme on lance un emprunt!
    Je me dis:
    "C'est un mirage ou quoi?"
    Et le petit avion est venu se reposer
    sur mon bureau en se dépliant.
    Ah! dis donc!
    Ce n'était plus la même rente!
    Il avait changé ma rente Pinay
    en rente Giscard!
    Ah! il est diablement fort!
    Pour échapper à son emprise,
    j'ai tout essayé.
    Je suis même allé voir un prêtre.
    C'est vous dire
    à quel point j'étais désespéré!
    Je lui ai dit:
    - Mon père, je suis possédé du percepteur.
    Pouvez-vous pratiquer l'exorcisme?
    Il m'a dit:
    - Mon fils... vous m'auriez parlé du Démon...
    J'aurais pu tenter quelque chose...
    Mais contre les puissances de l'argent...
    Je lui dis:
    - Qu'est-ce que je peux faire?
    Il m'a dit:
    - Payez!... Payez!... Payez pour nous!
    Alors, je paye!
    Et plus je paye mon percepteur,
    plus il me le fait payer!
    Il met ma faiblesse à contribution.
    Il me taxe sur ma valeur personnelle.
    Il m'impose sa volonté.
    Il me tourmente.
    Il me traque!
    Tout ça parce que
    j'ai eu la faiblesse de montrer
    des signes extérieurs de richesse,
    alors que ma richesse est tout intérieure!
     
    Dégoûtant personnage
     
    Il est curieux! Ce type
    Il est curieux!
    Tout à l'heure, dans la rue, je regardais passer une
    jolie femme . . .
    Il la regardait aussi!
    La même!
    Je lui ai dit:
    - A quoi pensiez-vous en regardant cette jolie femme?
    Il m'a dit:
    - A la même chose que vous!
    Je lui ai dit:
    - Vous êtes un dégoûtant personnage!

    Le petit poussin

    Récemment, je suis entré dans une auberge
    pour y dîner et sur la carte,
    il y avait marqué: " Poussin rôti ".
    Et... j'ai commandé un poussin rôti.
    J'ai vu arriver un petit poussin...
    dans une assiette... Hamm !!!
    Je n'en ai fait qu'une bouchée
    dans mon gros ventre !
    Un petit poussin !
    Vous avez déjà vu un petit poussin ?
    C'est mignon à croquer !
    C'est une petite boule jaune...
    Ça fait: cui-cui...
    Il n'était pas cuit !
    Et je n'en ai fait qu'une bouchée
    dans mon gros ventre !
    Ça aurait été une vieille poule, encore...
    Bon !
    Une dure à cuire... elle a vécu !
    (Elle a fait son temps !)
    Mais un petit poussin... !
    J'aurais mieux fait d'aller me faire cuire un œuf !
    Oh, ça ne vaut guère mieux !
    Chaque fois qu'on va se faire cuire un œuf,
    c'est comme si on envoyait
    un poussin se faire cuire !
    Parce que, qu'est-ce qui fait le poussin ?
    C'est l'œuf !
    Et encore... on ne sait plus !
    Il y a ce fameux dilemme que chacun connaît :
    Qu'est-ce qui fait l'œuf ?
    C'est la poule ! Bon !
    Jusque-là, il n'y a rien à dire.
    On est tous d'accord.
    Mais qu'est-ce qui fait la poule ?
    ... C'est l'œuf !
    Alors, la question est :
    Qui a commencé ?
    Est-ce l'œuf le père de la poule,
    ou la poule la mère de l'œuf ?
    Ça ne peut pas être le coq !
    Les coqs, eux, ne pondent pas d'œufs !
    Quoiqu'il n'y ait pas de poules sans eux !
    (œufs)
    Sans eux... les coqs !
    Comme il n'y a pas de coqs sans elles...
    (ailes)
    Sans elles, les poules !
    Évidemment ! Parce que sans ailes,
    il n'y aurait ni coqs,
    ni poules, ni poussins !
    Et ce serait tant mieux !
    Parce que j'aurais mangé autre chose !
    J'aurais mangé du veau...
    Un petit veau !
    Vous avez déjà vu un petit veau ?
    Un vieux bœuf... bon !
    Passe encore. Il a vécu... !
    Mais un petit veau...
    Vous avez déjà vu une petite tête de veau... ?
    A la vinaigrette !
    !!!
    J'aurais mieux fait de manger un œuf,
    parce que, comme on dit,
    qui mange un œuf mange un bœuf !!!

    L'étrange comportement de mes plantes

    Les plantes ont parfois un étrange comportement.
    Exemple :
    Dans mon jardin j'ai un chêne.
    Un chêne !
    Depuis quelques temps j'ai l'impression qu'il sent sa dernière heure arriver.
    Il sent déjà le sapin !
    J'ai observé que dès que la nuit tombait, il avait peur.
    Il a peur dans le noir, comme un enfant.
    C'est un arbre poltron, quoi !
    La nuit dernière, il y avait de l'orage et à chaque éclair je voyais
    ses branches se hérisser sur son tronc !
    Hah ...Hah !
    Tout ça dans un bruit de chêne !
    Parce qu'un chêne qui a peur,
    ça fait du bruit !
    C'est comme un claquement de dents ...
    mais dehors !
    Ce sont ses glands qui, sous l'effet de la peur, s'entrechoquent !
    Il claque des glands, quoi !
    Autre exemple :
    Chez moi dans la pièce du bas, j'ai un lierre ...
    Bon qu'il grimpe le long du mur,
    je ne dis trop rien.
    Je fais celui qui ne voit pas !
    Mais c'est que depuis quelques temps, il en abuse ! Il se déplace ! ....
    Il grimpe sur les fauteuils,
    il s'enroule autour des meubles !
    Vous savez comment il fait ?
    Il tire sur ses racines, il ramène le pot sous lui ...
    ... parce qu'il est très propre !
    Dans ma chambre, j'ai un pied de vigne ....
    Eh bien, chaque fois que je me mets dans la tenue d'Adam ...
    il y a une feuille qui ...
    ( Il imite le mouvement de la feuille de vigne qui vient pudiquement
    se placer sur le sexe. )
    Je la repousse ...
    Elle revient !
    L'instinct !
    (Il précise :)
    De la vigne vierge, hein !
    Attention !

    Le flux et le reflux
     
    Cet été, sur la plage,
    Il y avait un monsieur qui riait!
    Il était tout seul,
    Il riait! Il riait! Ha, ha, ha!
    Il descendait avec la mer . . .
    Ha, ha, ha!
    Il remontait avec la mer . . .
    Ha, ha, ha!
    Je lui dis:
    - Pourquoi riez-vous?
    Il me dit:
    - C'est le flux et le reflux . . .
    Je lui dis:
    - Eh bien, quoi, le flux et le reflux?
    Il me dit:
    - Le flux et le reflux me font "marée"!

    CAEN
     
    J'avais dit, "pendant les vacances, je ne fais rien!...
    rien!... je ne veux rien faire ".
    Je ne savais pas où aller.
    Comme j'avais entendu dire : " A quand les vacances?...
    A quand les vacances?..." Je me dis: " Bon!... Je vais
    aller à Caen... Et puis Caen!... ça tombait bien, je n'avais
    rien à y faire. " Je boucle la valise... je vais pour prendre
    le car... je demande à l'employé:
    - Pour Caen, quelle heure?
    - Pour où?
    - Pour Caen!
    - Comment voulez-vous que je vous dise quand, si je ne
    sais pas où?
    - Comment? Vous ne savez pas où est Caen?
    - Si vous ne me le dites pas!
    - Mais je vous ai dit Caen!
    -Oui!... mais vous ne m'avez pas dit où!
    - Monsieur... je vous demande une petite minute
    d'attention! Je voudrais que vous me donniez l'heure des
    départs des cars qui partent pour Caen!
    - !!...
    - Enfin!... Caen!... dans le Calvados!...
    - C'est vague!
    - ... En Normandie!...
    - Ma parole! Vous débarquez!
    - Ah!... là où a eu lieu le débarquement!... En Normandie!
    A Caen...
    - Là!
    - Prenez le car.
    - Il part quand?
    - Il part au quart.
    - !!... Mais (regardant sa montre)... le quart est passé!
    - Ah! Si le car est passé, vous l'avez raté.
    - !!... Alors... et le prochain?
    - Il part à Sète.
    - Mais il va à Caen?
    - Non il va à Sète.
    - Il Mais, moi, je ne veux pas aller à Sète... Je veux aller
    à Caen!
    - D'abord, qu'est-ce que vous allez faire à Caen?
    - Rien !... rien !... Je n'ai rien à y faire!
    - Alors Si vous n'avez rien à faire à Caen, allez à Sète.
    - !!... Qu'est-ce que vous voulez que j'aille faire à Sète?
    - Prendre le car!
    - Pour où?
    - Pour Caen.
    - Comment voulez-vous que je vous dise quand, si je ne
    sais pas où!...
    - Comment!... Vous ne savez pas où est Caen?
    - Mais si, je sais où est Caen!... Ça fait une demi-heure que
    je vous dis que c'est dans le Calvados!... Que c'est là
    où je veux passer mes vacances, parce que je n'ai rien à y
    faire!
    - Ne criez pas!... Ne criez pas!... on va s'occuper de vous.
    Il a téléphoné au Dépot.
    Mon vieux!... (regardant sa montre):
    A vingt-deux, le car était là.
    Les flics m'ont embarqué à sept...
    Et je suis arrivé au quart.
    Où j'ai passé la nuit!

    Sans dessus dessous

    Actuellement mon immeuble est sans dessus dessous.
    Tous les locataires du dessous
    voudraient habiter au-dessus !
    Tout cela parce que le locataire
    qui est au-dessus
    est allé raconter par en dessous
    que l'air que l'on respirait à l'étage au-dessus
    était meilleur que celui que l'on respirait
    à l'étage en dessous !
    Alors le locataire qui est en dessous
    a tendance à envier celui qui est au-dessus
    et à mépriser celui qui est en dessous.
    Moi je suis au-dessus de ça !
    Si je méprise celui qui est en dessous,
    ce n'est parce qu'il est en dessous,
    c'est parce qu'il convoite l'appartement
    qui est au-dessus, le mien !
    Remarquez, moi je lui céderais bien
    mon appartement à celui du dessous
    à condition d'obtenir celui du dessus !
    Mais je ne compte pas trop dessus.
    D'abord parce que je n'ai pas de sous !
    Ensuite, au-dessus de celui qui est au-dessus,
    il n'y a plus d'appartement !
    Alors le locataire du dessous
    qui monterait au-dessus
    obligerait celui du dessus
    à redescendre en dessous.
    Or je sais que celui de dessus n'y tient pas.
    D'autant que, comme la femme du dessous
    est tombée amoureuse de celui du dessus,
    celui du dessus n'aucun intérêt à ce que
    le mari de la femme du dessous
    monte au-dessus !
    Alors là-dessus ...
    quelqu'un est-il allé raconter à celui du dessous
    qu'il avait vu sa femme bras dessus
    bras dessous avec celui du dessus ?
    Toujours est-il que celui du dessus l'a su!
    Et un jour que la femme du dessous
    était allée rejoindre celui du dessus,
    comme elle retirait ses dessous ...
    et lui, ses dessus ...
    soi-disant parce qu'il avait trop chaud en dessous ...
    Je l'ai su parce que d'en dessous,
    on entend tout ce qui se passe au-dessus ...
    Bref ! Celui du dessous leur est tombé dessus !
    Comme ils étaient tous les deux saouls,
    ils se sont tapés dessus !
    Finalement, c'est celui du dessous
    qui a eu le dessus.

    La Porte

    Chaque fois que je fais mon " tour " à un moment j'invente une histoire.
    Je dis au public:
    Si quelqu'un veut bien me donner un thème sur lequel je puisse improviser...
    Et un soir, dans la salle, un spectateur me crie:
    - Moi, je vais vous en donner un.
    Voilá! Vous, Devos, l'artiste, quand vous n'êtes pas sur votre planche qui oscille sur la mer (rappel du sketch intitulé " L'artiste "), vous avez bien un pied-à-terre?
    Je lui dis:
    - Oui monsieur!
    - Eh bien, supposons que vous n'ayez pas payé votre loyer depuis des semaines.
    Le propriétaire des murs vous met à la rue
    II vous dit: " Prenez la porte!".
    Qu'est-ce que vous faites?
    Je lui dis:
    - Je la prends... et avec son chambranle!
    (Parce que, sans chambranle, une porte ne peut ni s'ouvrir ni se fermer, je vous le signale. Si vous prenez la porte, il faut emporter le chambranle avec!)
    Bref! Je prends la porte avec son chambranle et je sors dans la rue.
    Le spectateur:
    - Et alors?
    Je dis:
    - Et alors, arrivé au milieu de la rue, je pose ma porte...
    Il me dit:
    - Et alors?
    - J'ouvre la porte. Je sors dans la rue.
    Je prends l'air... Je fais quelques pas pour me dégourdir les jambes... Et comme le temps est à la pluie, je rentre. Je repasse le pas de la porte... et je me retrouve à la rue. Je dis: Tiens ? J'ai dû faire une fausse manoeuvre. Je ressors dans la rue. Je reprends l'air... le même... Je refais quelques pas pour me dégourdir les jambes... les mêmes! Et comme le temps est toujours à la pluie, je rentre. Je repasse le pas de la porte... et je me retrouve dans la même rue.
    Le spectateur:
    - Et alors?
    Je dis:
    - Alors, je change de rue.
    Je reprends ma porte... avec son chambranle... Tout à coup, j'entends frapper
    - Qui c'est?
    - Police!
    J'ouvre. Un agent de police...
    - Vous avez votre passe-porte ?
    - !!
    - Et votre permis de port de porte?
    Je dis:
    - ! Non!
    - Je vais être obligé de le mettre dans mon rapport(e).
    Je lui dis:
    - Mettez! Mettez!
    Il me dit:
    - Quel est votre nom?
    Je lui dis:
    - Il est sur la porte.
    - Ah, il me dit, c'est vous, Devos? N'allez pas en faire une histoire!
    Je lui dis:
    - C'est trop tard, je suis en train de la faire...
    Il me dit:
    - Oú habitez-vous?
    Je n'ai pas osé lui dire que j'habitais une porte... Pensez... à un agent!...
    J'ai dit:
    - J'habite le petit hôtel qui est lá!
    - Ah, il me dit, c'est la porte à côté. Je vous accompagne. Arrivé devant l'hôtel, je laisse ma porte au portier... avec la clef... pour qu'il puisse la déplacer le cas échéant..
    (Au public:)
    Vous me suivez, là ?
    Je loue une chambre et je vais me coucher...
    Le spectateur:
    - Et alors?
    Je dis:
    - Et alors, le lendemain, je téléphone au portier.
    Cinq minutes plus tard, ma porte est devant la porte de ma chambre. Je n'ai plus que deux portes à traverser et je suis chez moi. Je prends ma porte par la poignée (comme une valise), pour ne pas me faire remarquer... Je descends dans le hall... Et le concierge me dit:
    Monsieur, vous avez oublié de remettre la clef de la chambre!
    - Ah, je dis, non, je l'ai laissée sur la porte!
    Il me dit:
    - Oui, mais vous avez gardé la porte sur vous! (J'avais emporté les deux portes!)
    Alors, je lui rends la porte-clef...
    et je sors avec ma porte-bagage.
    (Au public:)
    Lá, il faut suivre, hein...Il faut suivre!
    Le portier se précipite. II me dit:
    - Monsieur, on vient de me mettre à la porte.
    Voulez-vous m'engager comme portier?
    Je lui dis:
    - Mais mon pauvre ami, si je vous engage comme portier, je vais être obligé de vous remettre á la porte!
    - Ah, il me dit, je n'avais pas pensé á ça...
    Je lui dis:
    - Si, si!... Ce que je peux faire pour vous, c'est vous prendre comme porteur...
    - Ah, il me dit, c'est mon premier métier. Avant d'être portier, j 'étais porteur.
    Je lui dis:
    - Qu'est-ce que vous portiez?
    Il me dit:
    - Tout ce qui se porte!
    Je lui dis:
    - Vous pouvez porter ma porte?
    Il me dit:
    Volontiers!... Je la porte oú?
    Je lui dis:
    - N'importe où ! Peu importe!
    Il prend ma porte sur son épaule.
    Oh, je lui dis, elle vous va bien.
    Vous la portez mieux que moi!
    Il me dit:
    - C'est une prête-á-porter...
    C'est ce que je porte le mieux!
    Et nous voilá partis...
    A un moment, il me dit:
    - Vous savez que j'ai voulu faire comme vous... Mais au lieu de prendre la porte, j'ai voulu emporter le toit.
    Je lui dis:
    - Et alors?
    Il me dit:
    - Comme le toit ne passait pas par la porte, j'ai voulu le passer par la fenêtre, mais ma femme s'y est opposée.
    Elle m'a dit: " Si tu franchis ce pas, je ne pourrais plus vivre avec toi car je ne saurais vivre sans toit! ".
    Elle m'a dit: " C'est le toit ou moi. Ou tu me prends, moi, ou tu prends le toit!"
    Je lui dis:
    - Qu'est-ce que vous avez fait?
    Il me dit:
    - J'ai fait le mur!
    A un moment, je lui dis:
    - Où on est ici?
    - On est à mi-chemin de " n'importe oú ". On vient de passer " n'importe " et on va arriver à " où ".
    Je lui dis:
    - Bon, laissez-moi lá! Ca va très bien...
    Il me dit:
    - Vous pouvez me donner un autographe?
    Je dis:
    - Volontiers ! Je le mets où?
    Il me dit:
    - Sur le chèque!
    Alors, je mets: " Au porteur... avec toute ma sympathie! "
    - Au revoir, monsieur. Portez-vous bien!
    Je ne sais pas ce qu'il a voulu dire...
    Et comme je m'apprêtais à reprendre ma porte,
    J'entends derrière... des gloussements... des rires étouffés..
    J'ouvre. Et je vois une salle obscure... avec des gens assis au premier rang... tout comme je vous vois, mesdames et messieurs...
    Et au milieu de la salle, un spectateur qui se met à crier...
    Des spectateurs:
    - Et alors?
    J'ai dit:
    - Alors... euh...
    Je ne savais plus du tout comment mon histoire se terminait.
    Je ne savais même plus comment elle avait commencé...
    Un trou de mémoire!
    J'ai dit:
    - Excusez-moi! Je me suis trompé de porte!
    Pfoff! (geste de la refermer)
    J'ai dit: Je vais sortir par la porte côté cour...
    Fermée!
    La porte côté jardin... fermée !?
    La porte du fond... fermée!
    Je dis: Tiens? Ca doit être la fermeture annuelle des portes. Je vais sortir par la porte qui donne dans la salle...
    Et alors que je croyais tourner la poignée de ma porte,
    je me suis aperçu que c'était la porte qui tournait mon poignet...
    Lá, j'ai compris que j'avais franchi un seuil.
    Comme on " s'emmure " dans un mur,
    Je m'étais " emporté " dans ma porte
    J'étais pétrifié dans mon chambranle...
    Je ne pouvais plus ni m'ouvrir ni me fermer...
    Savez-vous ce qui m'a sauvé, mesdames et messieurs?
    C'est la pluie... La pluie qui s'est mise à tomber.
    Une pluie bienfaisante...
    une pluie torrentielle... diluvienne!
    En peu de temps, tout a été inondé.
    J'avais de l'eau jusqu'à ma... serrure!
    C'est alors que l'image de l'artiste sur sa planche...
    (Rappel du sketch intitulé " L'artiste ")
    ... qui oscille sur la mer...
    J'ai pris ma porte.
    Je l'ai posée sur l'eau.
    Je suis monté dessus...
    Et je me suis laissé emporter par les flots
    en priant le Ciel que ma porte ne s'ouvre pas!

    Tours de clefs

    Moi-même, il y a des moments où je me demande si j'ai tout mon bon sens !
    Quelques fois je me pose la question !
    Parce qu'il m'arrive des choses que je ne peux pas expliquer !
    Comment expliquez-vous ça ?
    Exemple :
    Je rentrais de voyage ...
    Je mets ma voiture au garage qui est juste en face de chez moi ...
    Je sors ma valise ...
    Distrait, je garde la clef de la voiture à la main ... et ...
    j'ouvre la porte de ma maison avec la clef de ma voiture ...!!
    Le temps de réaliser, j'avais fait trente kilomètres !
    Alors que la route n'était même pas glissante !
    Je me suis dit :
    "bon puisque qu'en ouvrant la porte de ma maison avec la clef de ma
    voiture, je fait trente kilomètres dans le sens de l'aller ...
    En fermant la porte avec cette même clef,
    je vais faire trente kilomètres dans le sens du retour."
    Hop ! (geste de tourner la clef)
    Je referme la porte à double tour !
    Au lieu de trente kilomètres j'en fait soixante !
    Je me suis retrouvé à trente kilomètres
    de ma voiture mais de l'autre côté !
    Je me suis dit :
    "Bon je vais donner un simple tour de clef
    et je vais regagner mon point de départ."
    Hop ! (geste de tourner la clef)
    La maison qui cale !
    Une maison qui venait de faire ... combien ? ...
    quatre-vingt-dix kilomètres au quart de tour,
    comme sur des roulettes ... elle cale !
    On ne sait pas pourquoi !
    Alors obligé de faire les trente kilomètres
    à pied pour aller rejoindre ma voiture
    et pour constater, devant ma voiture
    que j'avais oublié la clef de
    ma voiture sur la porte de ma maison !!
    Alors j'ai essayé d'ouvrir la portière
    de la voiture avec la clef ...
    de la valise !
    La voiture qui se fait la malle !
    Obligé de refaire les trente kilomètres en sens inverse, la voiture à la
    main, en la tenant par la poignée, comme une valise !
    En redoutant de rencontrer le type avec sa voiture en bandoulière !
    ( Rappel de "Ceinture de sécurité" )
    Il m'aurait posé des questions idiotes ce type !
    C'est certain !
    Je n'ai plus eu qu'une chose à faire c'est de remorquer ma maison
    jusque dans mon garage pour y faire les réparations nécessaires ...
    ... Ce n'est pas la peine que je continue, les gens ne me croient pas !
    Je le vois bien !
    Et ils ont raison. Ils ont raison !
    C'est tellement énorme ... ce que je raconte là !
    C'est gros comme une maison !
    D'ailleurs, les gens sont tellement gentils ...
    Ils voudraient me croire ...
    Ils me le disent :
    Monsieur vous n'auriez pas une preuve de ce que vous avancez ?
    Un témoin clef ?
    Et j'en ai un !
    Il y a un spectateur qui est venu me voir,
    il m'a dit :
    "Monsieur, moi, j'ai vu votre maison
    glisser sur la route ! ... Elle a croisé la mienne
    qui glissait dans l'autre sens !"
    C'est tellement énorme ... que ... je l'ai pas cru !!!

    Le visage en feu
     
    J'arrive à un carrefour,
    le feu était au rouge.
    Il n'y avait pas de voitures,
    je passe!
    Seulement, il y avait
    un agent qui faisait le guet
    Il me siffle.
    Il me dit
    - Vous êtes passé au rouge!
    - Oui ! Il n'y avait pas de voitures!
    - Ce n'est pas une raison!
    Je dis:
    - Ah si! Quelquefois, le feu est au vert . . .
    Il y a des voitures et . .
    je ne peux pas passer!
    Stupeur de l'agent!
    Il est devenu tout rouge.
    Je lui dis:
    - Vous avez le visage en feu!
    Il est devenu tout vert!
    Alors, je suis passé!

    Les parcmètres
     
    Les parcmètres, c'est une tricherie!
    Vous savez que ça rapporte une fortune aux pouvoir publics?
    Une fortune!
    Je le sais parce que mon voisin
    s'est fait installer un
    petit parcmètre clandestin devant chez lui . . .
    Tous les soirs, il va retirer la recette . . .
    Il vit bien!
    Il s'est même acheté une voiture!
    Evidemment, il l'a mise devant
    son parcmètre.
    Depuis, il ne fait plus un rond.
    Mais ça, c'est de sa faute

    Tout va trop vite
     
    Vous avez remarqué comme les gens marchent vite
    dans la rue? . . .
    Il y a quelques jours,
    je rencontre um monsieur que je connaissais,
    je vais pour lui serrer la main,
    le temps de faire le geste . . .
    il était passé!
    Eh bien j'ai serré la main à un autre monsieur
    qui, lui, tendait la sienne à un ami
    qui était déjà passé depuis dix minutes.

    Ceinture de sécurité

    Mesdames et messieurs je ne voudrais pas vous affoler
    mais des fous il y en a !
    Dans la rue on en côtoie ...
    Récemment, je rencontre un monsieur.
    Il portait sa voiture en bandoulière!
    Il me dit
    "Vous ne savez pas comment on détache cette ceinture ?"
    Je lui dis :
    "Dites-moi ! Lorsque que vous l'avez bouclée,
    est-ce que vous avez entendu un petit déclic ? "
    Il me dit :
    "Oui, dans ma tête ! "
    Je me dis : "Ce type, il est fou à lier ! "
    J'ai eu envie de le ceinturer ...
    mais quand j'ai vu que sa ceinture était noire ...
    je l'ai bouclée !!!

    En dernier ressort
     
    Je connaissais un sportif qui prétendait
    avoir plus de ressort que sa montre.
    Pour le prouver, il a fait la course
    contre sa montre.
    Il a remonté sa montre,
    il s'est mis à marcher en même temps qu'elle.
    Lorsque le ressort de la montre est arrivé en bout de course,
    la montre s'est arrêtée.
    Lui a continué,
    et il a prétendu avoir gagné
    en dernier ressort!

    Textes de Raymond Devos

    _________________________________________________________________________________

    Vidéos sur Devos (à consulter)

    * vidéos dont le texte cité ici (voir citations choisies sketches)

    ·       Le petit poussin *

    ·       Le possédé du percepteur *

    ·       Savoir choir *

    ·       J'ai ouï dire…*

    ·       Où courent-ils ?…

    ·       L'artiste * (chanté)

    ·       Le bout du bout

    ·       Je zappe

    ·       Faites l'amour

    ·       Les bohémiens (chanté)

    ·      Le clown (chanté)

       

    EMISSIONS, INTERVIEWS A VISIONNER LIBREMENT OU COMMANDER

    AUTRES

    _________________________________________________________________________________

    Compléments:

    _______________________________________________________________________________

    En hommage à l'un de mes humoristes préférés!

    Tahheyyât, 16 juin 06

    (note et références mises à jour - Août 06)

    Publicité
    Commentaires
    Publicité