Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Elguijaronegro
11 mars 2008

BILAN

Souvent j'ai espéré: je fais un séjour en thalasso, et puis après je vais mieux, alors je peux faire d'autres activités, et périodiquement, je retourne en thalasso pour me maintenir en forme. Parce qu'il faut dire que la thalasso me prend 4 heures par jour.
Mais je me suis aperçu que lorsque j'arrête, je dégringole très vite, mes muscles redeviennent atone, mes articulations se bloquent.
D'autre part lorsque j'arrive dans la piscine, là est mon véritable élément, je me sens bien, légère, agile, souple, détendue!
C'est mon univers, ma maison. C'est un repère, un cadre important de ma vie, et il semble que je ne puisse plus faire "sans"!

J'ai pensé un temps que je pourrais peut-être essayer d'acheter un T2 (ou en louer à la rigueur) en face d'un des lieux de thalasso que je fréquente souvent, renseignements pris c'est impossible, raison financière très importante, prix exorbitants. Si nous aménageons notre maison avec des espaces spéciaux et en particulier thalasso, ça reviendra infiniment moins cher qu'acheter ou louer un appart!
Donc, en attendant d'avoir des installations performantes at home, il faut continuer les déplacements et consigner 4 heures quotidiennes pour ce traitement.

Mon mari qui conserve un mi-temps en service extérieur et plusieurs rencontres et réunions hebdomadaires pour remplir les engagements bénévoles locaux, n'a pas encore la maîtrise d'un emploi du temps qui lui permettrait à la fois d'aménager notre espace vital et de m'aider à faire beaucoup de choses sans pour autant les faire à ma place.
Je veux parler par exemple de ranger toutes les affaires et documents qui sont en tas et en plan dans les différentes pièces, ranger le linge, faire de la cuisine élaborée. On n'imagine pas comme le fait simple d'essayer de glisser des partitions dans des blisters, de répartir des documents dans des casiers, de trier des revues, du courrier, peut devenir pénible par la posture et les gestes répétitifs. Que dire du tri de caisses avec livres ou petits objets entassés dans les débarras et greniers, provenant de parents décédés, de boulots précédents. On n'imagine pas non plus combien une table ordinaire n'est pas à la bonne hauteur pour une personne assise en fauteuil roulant désirant peler ou couper des légumes, les disposer dans un plat, abaisser une pâte au rouleau à pâtisserie, pétrir.
Il faut que mon mari qui a pris l'habitude de faire tout tout seul, uniquement ce qu'il sait, comme il sait, laissant le reste en plan, dans l'espérance qu'un jour j'aurai la force ET le temps, se mue en aide auprès de moi, et fasse non pas pour moi, mais avec moi.
CAR je n'aurai JAMAIS le temps avec toutes les séances de thalasso, d'électrothérapie, de massage, de refexologie, les moments où je dois répéter mes musiques seule ou avec lui. Autant en prendre son parti, il faut qu'on repense notre vie autrement, avec beaucoup moins de web et de net pour moi c'est certain, ça fait longtemps que je le dis, et le crash informatique que nous avons vécu récemment n'est pas là pour le démentir! Et pourtant j'ai tout de même besoin de taper sur mon clavier et d'aller à la rencontre d'autrui par écran interposé, c'est un très grand facteur de calme et d'équilibre pour moi. Et d'apprentissage continué, et de socialisation.

Je crois que ces dernières années, j'ai utilisé énormément d'énergie à vouloir lutter contre la mauvaise image de moi, une certaine appreté à démonter cette étiquette de supercherie, d'imposture qu'on m'avait collée au boulot (ne comprenant pas pourquoi j'avais à la fois tant d'énergie et tant de fatigue et de dysfonctionnements). De plus être obligée d'être testée et jugée tous les six mois pour continuer d'obtenir un congès, rentrer dans les "normes" précises pour l'obtenir.
Et vouloir en même temps me prouver et prouver à autrui que j'étais toujours intelligente et douée, que rien ne pourrait abattre mon intelligence et ma créativité.
Pendant ce temps là, j'ai survécu, certes, j'ai beaucoup appris et réappris, mais je n'ai pas considéré que la maladie avançait à sa façon, j'espérais pouvoir toujours progresser. Je redevenais une personne humaine cultivée, spirituelle, je gravissais les époques et les âges, très longtemps coincée à l'adolescence, aux abords de la puberté. Mais mon corps continuait à s'user à l'intérieur, et il s'est mis à vieillir tout d'un coup à l'extérieur. Et à me rappeler que je n'avais plus 20 ou 30 ans, et qu'avec la maladie, j'ai des comportements, des réactions assimilables à des individus bien plus âgés que mon âge biologique. Ressembler à mes arrière-grands-mères et à mes grands-mères sur leur vieux-vieux jours, être atteinte des mêmes infirmités mais 20 à 30 ans plus tôt qu'elles, c'est dur soudain à avaler, et assez incompréhensible pour mon mari qui continue à voir en moi la compagne espiègle, vive, enjouée qu'il a épousée.

Il faut que j'arrête de m'étonner de la situation, de la réfuter ou de la refuser, et que je mobilise plutôt ma ténacité pour m'adapter à ces nouvelles données et tourner à un régime en phase avec mes possibilités actuelles motrices et une fatigabilité accrue. Il n'est plus souhaitable que j'explore continuellement le champ de tous les possibles, que je m'investisse dans toutes les directions, que j'éprouve toutes les émotions possibles. Je dois apprendre à restreindre mes objectifs et à gérer mon temps de telle façon à ne pas me sentir frustrée de ne pouvoir tout faire, et à ne pas léser ceux qui comptent sur quelques-uns de mes talents et services, en particulier à ne pas léser mon époux pour vivre une effective vie de couple et de famille. C'est compliqué, ça veut dire renoncer à des lieux, des personnes, des choses, des activités qui m'ont accueillie, accompagnée, aidée à grandir depuis 2001. C'est sans doute un pas de plus dans le fait de devenir adulte je pense, une personne mûre, mature qui fait des choix et qui s'y tient. La mue est difficile et la peau craque de partout!
J'en ai vu d'autres! L'important est d'être lucide et de marcher à son rythme. Pour pouvoir encore espérer dépasser ses limites, il faut savoir ne pas faire comme si elles n'existaient pas. La connaissance de soi ainsi que le respect de soi sont essentiels.

Tah 11 mars 08

Publicité
Commentaires
Publicité